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VICTOR HUGO, AUTEUR FRANC-COMTOIS

Victor Hugo est né à Besançon, dans le Doubs. C'est bien connu ! D'un père né à Nancy et d'une mère née à Nantes, Victor Hugo est, cependant, bien un auteur franc-comtois. Que pensait-il de la généalogie ? Voyage au pays de ses ancêtres du côté de Dole, dans le Jura.


Dole et ses environs, un des berceaux de Victor Hugo (photos Jérôme Decourcelles / DR ; Victor Hugo par Nadar / Paris Musées Collections)


Victor Hugo, né à Besançon, n'est resté que six semaines, jusqu'au début du mois d'avril 1802, dans la capitale comtoise. Normal quand on est fils d'un militaire en garnison qui reçoit, ce mois-là, une mutation pour Marseille. Pourtant, même si son père, Léopold Hugo, futur général d'empire, est né à Nancy le 15 novembre 1773, et sa mère, Sophie Trébuchet, est née à Nantes le 19 juin 1772, ses origines paternelles viennent aussi d'une autre grande agglomération de Franche-Comté : Dole, dans le Jura.


Marguerite Michaud, la grand-mère franc-comtoise


La ville natale de Louis Pasteur, père du vaccin contre la rage, de Marie-France Briselance, écrivaine et scénariste, et du chanteur Hubert-Félix Thiéfaine, a vu aussi naître, le 21 mars 1741, la grand-mère paternelle de Victor Hugo, Jeanne-Marguerite dite Marguerite Michaud. Marguerite a toute sa famille dans la capitale jurassienne et ses environs, entre Jura et Côte d'Or.

Femme au caractère bien trempé, elle devient gouvernante d'enfants à Nancy, chez le comte de Rosières d'Euvezin. C'est dans la capitale lorraine qu'elle rencontre son futur mari, un certain Joseph Hugo. De quatorze ans plus âgé, il est né à Baudricourt, dans les Vosges, est veuf et a trois filles, survivantes d'une fratrie de onze enfants. Ils se marient le 22 janvier 1770 à la basilique de Saint-Epvre à Nancy. Marguerite et Joseph Hugo auront huit enfants, dont le fils aîné, Léopold, futur chef de bataillon basé à Besançon et père de Victor Hugo.

Entourée de ses enfants, Marguerite veille à leur éducation. Le 16 septembre 1788, Léopold (photo) arrête ses études au collège royal de Nancy, ville qu'il "n'aime pas" (1), pour entamer une carrière militaire. La fin des années 1790 annonce les premiers mariages. Le premier de sa progéniture à se marier, c'est Léopold qui épouse, à Paris, le 15 novembre 1797, jour de son anniversaire, Sophie Trébuchet, native de Nantes et plus âgée que lui. Ce sera un mariage civil à l'hôtel de ville de Paris, sans cérémonie religieuse. Un an plus tard, le 15 novembre 1798, Marguerite Hugo devient grand-mère avec la naissance de son premier petit-fils, Juste Abel, dit Abel Hugo. Le 12 avril 1799, Marguerite Hugo devient veuve. Elle a 58 ans. Léopold et sa petite famille rejoignent la capitale lorraine pour la réconforter. Deux mois plus tard, appelé à l'armée du Danube, Léopold installe Sophie et Abel chez sa mère. La grand-mère Marguerite vit alors avec sa belle-fille qu'on surnomme Goton, issue du premier mariage de Joseph Hugo. Jusqu'à la fin septembre 1800, Sophie essuiera les vives discussions de sa belle-mère et de Goton sur l'éducation d'Abel, loin de suivre L'Emile de Rousseau. Ambiance étouffante, Sophie, même à nouveau enceinte, menace, plusieurs fois, de faire ses valises et de rentrer en Bretagne. Sans doute pour faire plaisir à la grand-mère Marguerite, le petit Abel est baptisé à Nancy...sans la signature de Sophie sur le registre. Le 30 septembre 1800, Léopold alors nommé adjudant à Lunéville, au sud-est de Nancy, Sophie et ses deux enfants Abel, presque 2 ans, et Eugène, âgé de 15 jours, le rejoignent, quittant le domicile de la grand-mère Marguerite.


Le 19 août 1801, Léopold est nommé chef de bataillon d'une demi-brigade en garnison à Besançon. Sophie, enceinte de son troisième enfant, et ses deux fils le suivent dans la capitale comtoise et s'installe au 140 Grande Rue (photo), face à la maison natale de l'écrivain Charles Nodier, près de l'immeuble où naîtront, en 1862 et 1864, les frères Auguste et Louis Lumière, pères du cinéma. C'est sur cette même place que naît Victor Hugo.


La grand-mère Marguerite Michaud, veuve Hugo, décède le 15 février 1814 à Nancy, à l'âge de 72 ans. La Franche-Comté est alors un Etat, depuis le 27 janvier de cette même année, dirigé par un gouverneur général, Conrad Karl Friedrich von Andlau-Birseck, qu'on surnommait le baron d'Andlaw.


Dole, Saint-Aubin et Tichey, villes des ancêtres de Victor Hugo


Les parents (2) de la grand-mère Marguerite Hugo, François Michaud et Marguerite Varspel, une ch'tie native d'Avesnes-sur-Helpe installée à Dole, s'étaient mariés le 11 mai 1721 à Saint-Aubin (photo), dans le Jura, à une quinzaine de kilomètres de la capitale jurassienne. La mariée, âgée de 14 ans et trois mois, venait de perdre, le 5 décembre 1720, son père, François Varspel, natif de Huise (aujourd'hui, au sud de Gand, en Belgique). L'homme que Marguerite Varspel épouse a 22 ans, presque 23.


Né à Tichey (photo), village voisin et enclave bourguignonne en Franche-Comté, François Michaud a grandi à Saint-Aubin avant de devenir boulanger à Dole. Dans l'assemblée de la vieille église pas encore ruinée, la mère de la mariée, Marguerite Tillier, devenue veuve, s'apprêtait à épouser, à presque 40 ans, Pierre Henry Paget, marchand boucher à Dole.


Saint-Aubin, c'est la terre où se sont aussi mariés les parents de François Michaud. L'arrière-arrière-grand-père de Victor Hugo, Claude Michaud, est un garçon de Tichey. A Saint-Aubin, il y a une jeune fille qui fait battre le cœur de Claude Michaud. Elle s'appelle Marguerite Barbier et est née dans le village franc-comtois le 24 mai 1673 (La Franche-Comté est alors un territoire du Saint-Empire Germanique (3)). Le 30 juin 1697, ils se marient à Saint-Aubin. Claude a quasi 30 ans, Marguerite presque 24.


Saint-Aubin, c'est le village où vit, encore aujourd'hui, la famille Barbier. Philippe et Denise Barbier, les parents de l'arrière-arrière-grand-mère Marguerite, se sont mariés dans cette même église de Saint-Aubin. Ils auront douze enfants. Si l'église de l'époque, tombée en ruine, a laissé la place, en 1833, à un nouvel édifice, celui-ci reste parmi les plus curieux puisque, en 1848, faute de bâtiment de mairie (il verra le jour en 1856), la devise Liberté, Egalité, Fraternité est apposée sur le fronton de l'église. En 1871, on y ajoutera, juste en-dessous, Vive la république !


Victor Hugo et la Franche-Comté


Victor Hugo ne connaîtra pas vraiment sa grand-mère franc-comtoise Marguerite Michaud, épouse Hugo, vivant au gré des affectations de son père ou suivant sa mère à Marseille, Bastia, l'île d'Elbe, Naples, Madrid ou encore Paris. Pourtant, il reste attaché à sa terre natale. Preuve en sont ces vers retrouvés dans son carnet :


"Car Dieu, qui dans mon sang composé de trois races

Mit Bretagne et Lorraine et la Franche-Comté,

D'un triple entêtement forma ma volonté."


En 1826, Victor Hugo dédicaça son recueil de poésies Odes et Ballades à l'Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts de Besançon expliquant à son secrétaire perpétuel, natif de Dole, François-Joseph Génisset, le 5 octobre 1827, que "Si une Académie est chère et précieuse à mes yeux, c'est avant toutes celle qui soutient si dignement le nom de notre grande et illustre Comté."


La Franche-Comté se glisse aussi dans l'écriture de Victor Hugo comme dans Les Misérables où M. Myriel, à la Révolution, trouve asile à Pontarlier (dans le Doubs), ville où il a de la famille. Dans Les Travailleurs de la mer, mess Lethierry, l'homme notable de Saint-Sampson, compagnon dans la charpenterie, "avait travaillé aux appareils d'épuisement des salines de Franche-Comté". Dans ce même roman, publié pendant l'exil de Victor Hugo, on trouve, à propos du prénom de Déruchette, l'anecdote d'une "belle dame de la high life de Saint-Sampson, femme d'un forgeron riche ne travaillant plus, une sixty, comme on dit à Guernesey" qui "dit à mess Lethierry : Désormais j'appelerai votre fille Nancy. - Pourquoi pas Lons-le-saulnier ? dit-il".


Victor Hugo et la généalogie


Victor Hugo écrivait dans une lettre du 20 mars 1867, destinée au journaliste Albert Caise (4), en proie à des moqueries ironique du Figaro à propos de l'arbre généalogique des Hugo qu'il avait établi : "Personnellement, je n'attache aucune importance aux questions généalogiques. L'homme est ce qu'il est, il vaut ce qu'il a fait. Hors de là, tout ce qu'on lui ajoute et tout ce qu'on lui ôte est zéro. D'où mon absolu dédain pour les généalogies."


Article rédigé par Jérôme Decourcelles, de la Société des Amis de Victor Hugo

(1) Lettre du 3 juin 1800 de Léopold Hugo à Sophie Trébuchet.

(2) D'après l'arbre généalogique établi dans Victor Hugo, tome 1, Avant l'exil 1802-1851, Jean-Marc Hovasse, Fayard, 2001

(3) La Franche-Comté sera annexée par la France, cédée par l'Espagne lors du second traité de Nimègue, le 17 septembre 1678.

(4) Albert Caise (1840-1908) a notamment écrit La jeunesse d'une femme (1869) et fondé le Journal des femmes (décembre 1891), dirigé par Maria Martin.


Bibliographie :

Victor Hugo, tome 1, Avant l'exil, 1802-1851 de Jean-Marc Hovasse, Fayard, 2001

Victor Hugo, Œuvres complètes, Edition Chronologique, Club Français du Livre, 1969


Remerciements aux habitants de Tichey (Côte-d'Or) et à M. Jean-Claude Michaudet, président de l'association du Musée du Patrimoine de Saint-Aubin (Jura).


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